l'Edito, par Jérôme LOPEZ, Président de la CPME Isère

Jérôme LOPEZ,
Président de la CPME Isère

 

Je suis particulièrement heureux de vous accueillir ici ce soir, dans cette vaste demeure seigneuriale, au pied du Massif du Vercors et sous l’œil je l’espère bienveillant de la Fée Mélusine représentée sur la façade du château, surtout après deux années où pour cause de pandémie nous avons été empêchés de nous réunir.

J’aurais aimé vous dire que tout ça c’est derrière nous mais malheureusement, l’épidémie de Covid 19 n’est pas encore vaincue et depuis, d’autres risques sont apparus face auxquels nos entreprises ont dû s’adapter : la guerre en Ukraine, la hausse du coût des matières premières, la pénurie de matériaux, les prix de l’énergie… tout cela dans un contexte de pénurie de main d’œuvre et de difficultés de recrutements avec un marché du travail qui ne parvient pas à fournir assez de personnel.

Bref ! une année 2022 exceptionnelle à plein d’égards qui a demandé à nos entreprises et à chacun d’entre nous de nombreuses facultés d’adaptation.

J’ai le sentiment que collectivement et individuellement, nous avons donné le meilleur de nous-même ce qui nous a permis de finir 2022 dans de moins mauvaises conditions.

Dans ce contexte perturbé, et qui l’est encore davantage à l’heure où je vous parle avec les mouvements de grève consécutifs à la réforme des retraites sur laquelle je reviendrai, comment allons-nous aborder 2023 ?

Et surtout, ce « nouveau monde » dont on nous parle nous sera-t-il favorable ?

Darwin disait « ceux qui survivent ne sont pas les plus intelligents, mais ceux qui s’adaptent le mieux aux changements »

Je sais que nous, chefs d’entreprise, avons démontré ces dernières années notre aptitude à rebondir, nos capacités d’adaptation, notre courage.
Je sais que ces années passées nous ont rendus plus forts.

Dans la fable de Lafontaine, nous sommes le roseau… « le roseau plie mais ne rompt pas » !

Avec la crise, le mot résilience est rentré dans le langage courant et nous l’avons fait nôtre. Nous avons su mettre en place de nouvelles stratégies adaptées aux nouveaux besoins et aux nouveaux défis auxquels nous avons eu à faire face. Nous nous sommes habitués à naviguer dans le brouillard, sans aucune visibilité et avec une incertitude totale sur l’avenir.

Notre priorité, notre phare, la lumière dans la nuit, c’est la sauvegarde de nos entreprises et leur pérennité et avec elles, la préservation de nos personnels.

A ce sujet, je veux réagir à certaines idées qui nous sont proposées pour faire face à nos difficultés de recruter. Bien sûr que nous sommes conscients que la première valeur de nos entreprises, ceux sont les hommes et les femmes qui la compose. Bien sûr que nous voulons préserver cette valeur, notamment en accordant des hausses de salaires sans précédents, même si par cette action nous alimentons la boucle de l’inflation.

Pour soutenir le pouvoir d’achat de nos salariés, nous disons OUI à la mise en place d’intéressement, OUI à la participation, OUI au partage de la valeur… mais il y a des limites : la notion de dividende salarié est un non-sens !

Par définition, le dividende est la rémunération du risque, quand le salaire est la rémunération du travail. Sans risque, pas de dividende… ou alors il faut aussi partager les pertes ! Prenons garde à ne pas détourner la valeur Travail, celle-là même à laquelle nous sommes attachés et qui a été mise à mal ces dernières années.

Dans ce contexte mouvant, il nous faut bouger les lignes et nous adapter. Pour être en phase avec nos salariés et avec les demandeurs d’emploi que nous recevons, il nous faut nous familiariser avec les notions de Qualité de Vie au Travail, de bien-être au travail, de Management à distance, etc… Toutes ces thématiques abordées au sein de nos différentes commissions de travail et j’en profite pour remercier nos animateurs.

Dans cette ambiance perturbée, avec des hausses de charges devenues quasi quotidiennes, il nous faut préserver nos marges et nos capacités d’investissement alors même que nos partenaires bancaires se montrent de plus en plus frileux. La situation vous la connaissez tous et l’heure n’est pas à noircir le tableau encore davantage. Si vous êtes là c’est que vous êtes chefs d’entreprise, engagés au sein de la première organisation patronale en France en nombre d’entreprises.

Pendant toutes ces années de grosses difficultés, la CPME s’est battue pour vous et avec vous, elle a porté notre voix auprès du Gouvernement et a défendu inlassablement nos PME et nos TPE. C’est ainsi que 27 mesures en matière économique, sociale et environnementale ont été obtenues par la CPME en 2022. Des succès dont nous pouvons être fiers…

Je ne les citerai pas tous ! mais quand même parmi eux :

  • Sur le prix de l’énergie : l’obtention de la garantie prix électricité qui aboutit à une baisse directe du prix de 35 % pour les TPE et les PME ;
  • Et le renforcement du bouclier tarifaire pour les TPE ;

Malgré cela la CPME répète depuis plusieurs mois que ces dispositifs mis en place par le gouvernement ne sont malheureusement pas suffisants. Et leur segmentation en fonction de la taille de l’entreprise, de la puissance du compteur ou du secteur d’activité, ne contribue pas à clarifier la situation.

Il nous faut aller plus loin : toutes les PME devraient pouvoir résilier sans frais leur contrat de fourniture d’électricité.

  • Autre succès : la CPME a obtenu l’allongement de la durée de remboursement du PGE pour les TPE qui ont des difficultés à rembourser et la prolongation de la garantie de l’Etat ; même si on peut qualifier cette mesure de demi succès compte tenu des conditions encore trop drastiques…
  • Un succès avec la prorogation du Crédit d’impôt Innovation.
  • Pour nos amis commerçants, la revitalisation des centres villes avec la prolongation du programme d’action Cœur de Ville jusqu’en 2026.
  • Rappelons-nous, en début d’année 2022, dans la continuité des aides liées au Covid, la CPME a obtenu la prolongation de la prise en charge de l’activité partielle pour les entreprises les plus fragiles ;
  • La fin du protocole sanitaire en entreprise et la simplification de la gestion des cas positifs et des cas contacts ;
  • La fin du télétravail obligatoire ;
  • Plus près de nous, succès avec la prolongation des aides pour les embauches en contrats d’alternance, Professionnalisation et Apprentissage.
  • La création de la Prime de Partage de la Valeur défiscalisée et exonérée de charges sociales.
  • La mise en place simplifiée de l’intéressement dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Et enfin, la CPME a milité pour accompagner les entreprises en matière de transition écologique et de RSE, convaincue que ces sujets ne sont pas uniquement réservés aux grandes entreprises. Et dans ce domaine, les seuils de déclenchement des aides étaient bien souvent inadaptés à nos catégories d’entreprises.

Nos combats sont loin d’être terminés et à l’issue, je l’espère, de nombreuses nouvelles satisfactions…
Parmi nos actions, dans un climat de difficultés de recrutement, nous plaidons pour la suppression des charges au-delà de la 35ème heure pour un résultat gagnant-gagnant pour nos salariés, pour servir nos clients au mieux, sans alourdir le coût du travail.

Aujourd’hui se profile le risque d’une forte mobilisation et de blocage du pays suite à la réforme annoncée des retraites. D’une façon quasi unanime, le patronat approuve ce projet de réforme.

La CPME qui a été autour de la table de la concertation considère que celle-ci va dans le bon sens, celui de l’équilibre de notre système de retraite. Mieux que quiconque, nous sommes bien placés pour savoir combien le travail finance notre modèle social généreux.

Les régimes de retraites complémentaires que nous gérons de façon paritaire, avec l’ensemble des partenaires sociaux, présentent eux des soldes positifs. Nous restons attachés à notre modèle social que nous avons en partie co-construit, mais nous sommes aussi responsables et savons qu’il faut parfois prendre des mesures désagréables pour satisfaire le bien commun et sa pérennité.

La CPME a ainsi été écoutée et entendue sur un certain nombre de points.

Travailler plus longtemps était une nécessité pour sécuriser et équilibrer les finances du régime dans la durée et s’assurer que les générations futures auront le même niveau de pension que la génération qui part actuellement à la retraite.

Ce projet met aussi fin à certaines iniquités en supprimant la plupart des régimes spéciaux pour les nouveaux entrants qui seront désormais affiliés au régime général.

Sur l’emploi des seniors, la CPME se satisfait de l’assouplissement de la retraite progressive et de la simplification du cumul emploi-retraite créateur de droits.

Elle se satisfait aussi de l’augmentation de la pension de retraite pour une carrière complète qui s’étend aussi aux retraites actuelles. En cette période de vœux, souhaitons que les blocages annoncés restent limités et que le droit à la paresse revendiqué par certains ne l’emporte pas sur la valeur Travail à laquelle nous sommes profondément attachés !

Malgré ce contexte difficile nous nous devons d’être porteurs d’espoir et afficher notre fierté d’être chefs d’entreprise.

Il semble que le moral de nos dirigeants tienne, malgré des doutes croissants sur l’avenir et gérer des difficultés fait plus que jamais partie de notre quotidien. Il y a quelques années en arrière nous nous projetions en nous appuyant notamment sur la logique des Forums 4I pour Innovation, Industrie, Investissement et International.

Aujourd’hui ces 4I se sont réduits en Incertitude et en Inquiétude !

Pour autant nous faisons face et pour gérer ces difficultés, ces transformations de notre société, il nous faut de l’agilité, de l’innovation, de la prise de risques, de la résilience, un peu de folie et peut-être un peu de méthodologie.

En m’inspirant de la Règle des 5 S que vous connaissez tous, voici la recette que nous aimons partager à la CPME…

  • Le premier S, c’est l’indispensable Santé, la Santé de nos dirigeants ; parce qu’à la CPME nous sommes des patrons patrimoniaux, nous savons bien que la personne physique et la personne morale sont indissociables et il en est de même pour la santé. La santé de nos entreprises c’est avant tout notre santé, celle des dirigeants… pour ce faire, nous sommes à vos côtés et avons mis en place des dispositifs de soutien et de prévention des difficultés.
  • Le second S, pour Solidarité, ensemble nous sommes plus forts, nous mettons en commun nos expériences et cultivons notre intelligence collective.
  • Un troisième S pour Sincérité : dans une période où nous savons pertinemment que certains de nos fournisseurs profitent de la conjoncture pour nous imposer des hausses de prix injustifiées, à la CPME nous souhaitons revenir à des principes de réalité et vous soutenir avec sincérité.
  • Pour le quatrième S, je prônerais un peu de Sérénité : en cette période où nous devons prendre des décisions dans l’urgence, où on nous a imposé de fermer nos entreprises, du jour au lendemain, où les délais sont toujours de plus en plus courts, il est bon de garder la tête froide et de rester sereins.
  • Le cinquième S, pour nos Succès : notre mobilisation, notre persévérance conduisent au succès et je vous en ai déjà listé un certain nombre. Préférons le verre à moitié plein plutôt que le verre à moitié vide…
  • Et parce qu’à la CPME nous voulons toujours en faire plus pour vous, je vais rajouter un sixième S, pour la Satisfaction : c’est notre objectif quotidien, arriver à vous satisfaire !
  • Et un septième S pour Soutien : c’est notre raison d’être, vous représenter, vous soutenir dans ce labyrinthe législatif en perpétuelle évolution.

Avec ces 7 S vous en avez un par jour de la semaine… pourtant il en manque un ! Celui de Super… de Supers Héros !

Parce que vous êtes, nous sommes des Supers Héros… même si la société ne le reconnaît pas au quotidien ! Des Supers Héros, sans masques, souvent anonymes, mais qui d’autres que nous créons la valeur ?

Nous somme 99 % d’entreprises de moins de 20 salariés et nous restons anonymes ! Sans notre travail, sans notre prise de risques, point d’emplois. Seul le travail créé la richesse, cette richesse si facile à redistribuer…

A ceux qui nous disent nous avons supprimé des impôts et en avons allégé d’autres, je réponds merci, c’est bien… mais nous restons encore le pays le plus taxé sur le travail.

A ceux qui nous disent, nous avons mis en place des aides pour faire face aux difficultés, je réponds ok ! mais qui a créé ces difficultés ?

Le coût de l’énergie en est le parfait exemple : nous avions un parc nucléaire sur capacitaire et largement capable de nous assurer une autonomie énergétique jusqu’à des décisions politiques basées sur des lobbies qui ont vite été oubliés en cette période de nécessité.

Le coût de notre électricité n’est pas basé sur un prix de revient comme toutes nos offres de produits et de services, mais sur le respect d’un accord politique avec l’Europe.

Les aides qui sont insuffisantes, c’est d’abord notre argent qui est pris, puis une partie qui nous est rendue, je n’appelle pas ça une aide ! Quoiqu’il en soit et d’une manière générale, les aides sont créées pour palier à de mauvais choix politiques.

Nous ne voulons pas d’aides, nous voulons que nos décideurs arrêtent de nous empêcher ;

Sur ce thème, notre Président National François Asselin prône pour un « Test PME » avec un principe simple : avant toute réforme, tester les nouvelles dispositions sur un panel représentatif de PME et, le cas échéant, ajuster les effets indésirables.

Mais aujourd’hui il est plus facile pour les médias de commenter les aides mises en place pour les entreprises – les « cadeaux aux entreprises » – plutôt que de rappeler que ces aides ne peuvent être données que grâce à la richesse créée par nos propres entreprises !

Notre pays devrait être fier d’avoir des hommes et des femmes qui s’engagent, qui prennent des risques, fier d’avoir des entrepreneurs.

Pour ma part je suis fier de m’adresser à cette salle remplie de Supers Héros anonymes ! Participer activement à la création de richesses, être attachés au bien commun et à nos territoires fait partie de nos engagements.

Alors si nous voulons influer sur les décisions prises, soyons toujours plus nombreux au sein de notre grande famille d’entrepreneurs afin que nos messages de réalisme, de pragmatisme, de courage soient reconnus et entendus.

Acharnons nous à déployer une incessante pédagogie de gestion, d’anticipation, afin que nos décideurs ne se limitent pas à regarder les bons chiffres dans le rétroviseur, mais écoutent nous alertes sur ce qui se profile à l’horizon ; Les chiffres des entreprises en difficultés repartent à la hausse et ce, avant même la crise énergétique. Il y a urgence à ce que nous soyons entendus !

En période de difficultés le repli sur soi est un réflexe darwinien mais plus que jamais l’intelligence collective est un atout, restons ensemble pour voir l’avenir comme Antoine de St Exupéry « Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir, mais de le rendre possible ».

En conclusion, parce qu’on ne construit pas l’avenir l’estomac vide… je vais vous dire Carpe Diem, face à l’incertitude des lendemains, profitons de l’instant présent et apprécions ce que nous avons. Savourons ces moments de convivialité et d’échanges qui nous ont tellement manqués,

Profitons-en pour recharger nos batteries, dans cette période où elle est si chère, montrons que nous avons de l’énergie à revendre !

Belle et heureuse année à vous toutes et à vous tous !

Bonheur, réussite et santé !

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